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Libre rage ( relais et point de chute !)

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Libre rage ( relais et point de chute !)
5 août 2020

Lettre ouverte à la Défenseure des droits. 15 propositions pour la désescalade

 

En réaction aux déclarations et propos officiels niant l'existence des violences policières, le réseau des victimes réuni autour de l'Appel des Familles adresse ce courrier à la successeure de Jacques Toubon. Nous lui adressons également nos propositions pour la désescalade des méthodes des forces de l'ordre, contre le déni des violences policières et contre le déni de justice.

Nous, familles de victimes, blessé.e.s et collectifs de blessé.e.s, sommes particulièrement attentifs à vos déclarations. Aussi avons-nous été consternés par vos premiers mots sur les violences policières, le 24 juillet dernier, sur France-Inter : « D’abord, je n’aime pas beaucoup ce terme-là qui voudrait accuser l’ensemble de la police », avez-vous répondu à la question sur l’un des sujets prioritaires de l’actualité comme de l’institution dont vous avez la charge. 

Madame la Défenseure, votre motif pour récuser le terme de violences policières est irrecevable et vos mots sont d'une très grande violence, c’est un mépris pour nos vies.

Apprenez que la vie de votre fils, de votre mari, de votre frère, de votre père ou de votre mère peut être arrachée pour rien par les mains de policiers ou de gendarmes. Imaginez les douleurs atroces et les supplications de votre proche avant de rendre son dernier souffle, ou quand sa chair éclate sous l’impact d’armes qui le mutilent à perpétuité. Regardez dans quel état nous retrouvons le corps supplicié de nos proches.

Comment et pourquoi refuser de nommer les violences policières pour ce qu’elles sont ? Cédric Chouviat a répété sept fois « J’étouffe », avant de succomber sous les coups de policiers sourds, puis menteurs. Pourquoi vous taire lorsqu’un ministre de l’Intérieur se livre volontairement à un jeux de mots abject pour nier la réalité de ces actes barbares et choisit de cumuler la bassesse, l’ignominie et l’outrage aux victimes et à leurs familles pour défendre son administration ?

Un sinistre record a été battu durant le confinement* : dix décès à la suite d’une intervention des forces de l’ordre pour le seul mois d’avril. Dont quatre dans une cellule de garde à vue. Comme Mohamed Gabsi, le 8 avril, mort d’asphyxie dans le commissariat de Béziers, alors qu’il était plaqué à terre et menotté. Victime des techniques d’immobilisation par étouffement, comme Lamine Dieng, Ali Ziri, Adama Traoré et Cédric Chouviat, parmi tant d’autres.
(* Selon les seuls recensements disponibles, réalisés par le magazine Bastamag et le site Désarmons-Les).

Ce ne sont pas des « bavures » ni des « dérapages », mais les conclusions inéluctables d’un système : celui de l’impunité croissante accordée aux policiers et aux gendarmes quand ils blessent, mutilent et tuent. Parallèlement, la concentration de personnes racisées parmi les morts et les victimes d’exactions diverses des forces de l’ordre traduit aussi l’enracinement d’un racisme structurel dans cette violence d’État, dite légitime.

Ce que la société française a toléré et excusé de longues décennies, tant que cela ne touchait « que » les habitants des quartiers populaires, noirs, arabes, roms, asiatiques, déborde aujourd’hui jusque dans les centres-villes et frappe les manifestant.e.s indistinctement. Les violences illégitimes commises par des policiers et des gendarmes sont désormais devenues banales, ordinaires, comme le démontrent les images abondamment documentées sur l’agressivité disproportionnée des forces de l’ordre ces dernières années et le bilan historique des blessé.e.s, des mutilé.e/s. et des mort.e.s. Ces violences qui n’existent pas mais que tout le monde voit sont l’expression d’une dérive systémique.

A la différence d’un homicide ou d’une agression « ordinaires », nous devons lutter en justice contre des agents protégés par leur fonction, notamment pour assurer la couverture de leurs frais judiciaires, pour lesquels nous-mêmes devons nous endetter. Nous luttons aussi contre des magistrats qui n’instruisent qu’à décharge à l’égard des fonctionnaires impliqués. Et les mis en cause sont maintenus en activité professionnelle, là où n’importe quel tueur ou auteur de coups barbares est mis en examen et aussitôt placé en détention. Nous nous trouvons à affronter non pas une « brebis galeuse » mais tout un appareil sécuritaire d’état qui multiplie les entraves à notre quête de vérité et de justice.

Les non-lieux qui closent systématiquement les plaintes intentées contre des membres des forces de l’ordre nous adressent un double message. Le premier est que le meurtre d’un être humain par une personne dépositaire de l’autorité publique est un non-événement. C’est la routine policière. Le second enseignement est que cette impunité des forces de l’ordre autorise la répétition, la constance et l’aggravation de tels actes.

L’impunité s’établit avec les mensonges coordonnés et l’écriture de faux par des fonctionnaires assermentés, c’est la première étape de la fabrique du non-lieu. Cette impunité se conforte par la multiplicité d’enregistrements vidéos devenus indisponibles, détériorés ou disparus : « On veut les vidéos ! » réclame la famille d’Ibrahima Bah depuis neuf mois. Une impunité prolongée aussi avec des témoins que des juges refusent d’entendre sous des prétextes administratifs, c’est la situation insensée qu’affronte la famille de Wissam El Yamni depuis huit ans. Et enfin, une impunité institutionnalisée par des lois sécuritaires toujours plus tolérantes et laxistes à l’égard des excès des forces de l’ordre. Comme celle du 28 février 2017, ultime loi du quinquennat Hollande – rédigée en urgence sous la pression des syndicats policiers pour défendre l’un des leurs jugé pour homicide – qui a élargi la légitime défense accordée aux membres des forces de l’ordre. Par l’extension du droit de tuer accordé aux agents, cette nouvelle législation permet désormais de justifier plus aisément le classement sans suite des homicides commis par des policiers, leur garantissant une impunité sans faille.

C’est contre cette défense dévoyée pour faire jurisprudence et légitimer le meurtre d’Angelo Garand, tué de cinq balles, le 30 mars 2017 à Blois, que sa famille se bat depuis trois ans. Comme les familles d’autres victimes tuées par arme à feu. Babacar Guèye abattu le 3 décembre 2015, à Rennes. Liu Shaoyao abattu sous les yeux de ses filles le 26 mars 2017, chez lui à Paris. Jérôme Laronze, abattu de trois balles le 20 mai 2017, à Sailly, pour une infraction administrative. Gaye Camara, abattu dans sa voiture à épinay, le 16 janvier 2018, malheureusement les vidéos publiques sont « brouillées ». Aboubacar Fofana abattu dans sa voiture à Nantes, le 3 juillet 2018. Accusé par le policier d’avoir voulu l’écraser, jusqu’à ce que des vidéos amateurs prouvent le mensonge complet du porteur de l’uniforme républicain. Romain Chenevat, un mois plus tard, le 14 août 2018, abattu dans sa voiture en plein Paris pour un feu défectueux. La liste complète est effroyable.

Depuis l’élection d’Emmanuel Macron en 2017, la France a été condamnée à six reprises par la Cour européenne des droits de l’Homme, dans les affaires Mohamed Boukrourou, Abdelkader Ghedir, Naguib Toubache, Ali Ziri, Foued Chebab et Joseph Castellani. Et dans l’affaire Lamine Dieng, au terme de treize ans de procédure, la France a désavoué sa propre justice en reconnaissant sa responsabilité devant la CEDH, en juin dernier. Ces affaires ont eu lieu avant le mandat de l’actuel président de la République, mais celui-ci n’en tire aucune leçon et, de plus, affirme éhontément un déni absolu des violences policières.

On découvre aujourd’hui que près de 17 000 membres des forces de l’ordre se livrent à des échanges ultra-racistes dans des groupes en ligne. On apprend que la compagnie de sécurité et d’intervention de Seine-Saint-Denis doit être dissoute tant sa hiérarchie est vérolée par des faits de violences, vols, falsifications de procès-verbaux et trafic de stupéfiants. Et que d’autres CSI de la région Île-de-France vont aussi être « réorganisées » au gré des enquêtes en cours. On lit aussi que le policier condamné en 2017 à cinq ans de prison, avec sursis, pour avoir tué un homme, n’a jamais été sanctionné en interne et vient d’être élu délégué syndical. Une insulte pour toutes les familles de victime, mais surtout une ignominie revendiquée à la face de la justice et de l’État de droit par le syndicat majoritaire chez les gardiens de la paix.

Ne sont-elles pas représentatives de la police française ces organisations professionnelles qui défient ouvertement le pouvoir politique, menacent de ne plus se conformer aux ordres de leur ministre et soutiennent les manifestations sauvages pour le maintien des techniques d'étranglement ?

Un brigadier-chef révèle à la presse des pratiques racistes dégradantes et des vols perpétrés à l’encontre des prévenus, dans l’enceinte même du Palais de Justice de Paris. Mais cette dénonciation publique ne survient que parce que la hiérarchie préférait étouffer les alertes du policier. Nous sommes bien loin de méfaits individuels de quelques « brebis » défaillantes. « Lorsque l'on parle de brebis galeuses, j'ai envie de parler de troupeaux de brebis galeuses, parce que c'est une réalité », commente un commandant de police, quelques jours plus tard sur France Culture. Des troupeaux qui prolifèrent car les rares agents lanceurs d’alerte se voient plutôt menacés et sanctionnés que promus. On peine à discerner l’exemplarité exigée des membres des forces de l’ordre quand leur loyauté s’affirme inconditionnelle à l’égard de leur corporation et de leurs chefs mais s’oppose systématiquement à leur mission de défense des droits des citoyens, donc à la loi.

Voilà pourquoi, Madame la Défenseure des droits, le terme de violences policières systémiques est le plus juste pour caractériser ces pratiques, en France comme partout dans le monde. Car ce n’est pas tant contre les meurtriers de nos proches et contre les agents mutileurs que nous nous battons ; mais contre un ensemble de pratiques qui garantissent et accroissent l’impunité des policiers et gendarmes mis en cause. Des pratiques qui font système pour nous dénier le droit à la justice.

Il y a quinze ans, aux noms de Zyed et Bouna, les quartiers populaires se révoltaient contre le racisme et les violences policières. Depuis, nous constatons que ces brutalités des forces de l’ordre se sont systématisées dans tout le pays. Allant de pair avec la militarisation des équipements et l’usage d’armes comme de techniques toujours plus agressives, qui ne produisent que plus de tensions et de désordres. Ainsi que l’ont documenté la Ligue des droits de l’Homme, Amnesty International et l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture. Ces méthodes ont conduit à la disparition de Steve Maïa Caniço, le 21 juin 2019, à Nantes.

Jusqu’à quand les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire vont-il poursuivre cette escalade ? Le contre-exemple américain actuel n’est-il pas suffisamment explicite ? La criminalisation des manifestants et l’envoi de troupes surarmées ne font qu’exacerber ces violences : sont-ils la seule option ?

Voilà aussi pourquoi nous revendiquons une autre voie pour notre société : celle de la désescalade, contre le déni des violences policières et contre le déni de justice, avec les quinze premières demandes suivantes.

 

POUR LA DÉSESCALADE,
nous exigeons :

  • la mise en place d’un récépissé qui oblige les agents à justifier les contrôles d’identité qu’ils opèrent. La cour de Cassation a définitivement condamné l’État en 2016 pour les contrôles au faciès et pourtant ils perdurent.
  • la suppression du délit d’outrage et rébellion. Pour en finir avec les procédures abusives, le harcèlement quotidien, la mise sous tension de toute une ville comme à Argenteuil et le « business des outrages » pratiqué par certains policiers.
  • l’abrogation de l’article « Permis de tuer » L435-1 de la loi de sécurité intérieure du 28 février 2017.
  • l’interdiction des techniques d’immobilisation par étouffement : plaquage, pliage et clé d'étranglement.
  • l’interdiction des armes classées armes de guerre (LBD et grenades) et les pistolets électriques, par la police du quotidien comme lors des manifestations.
  • l’interdiction des courses-poursuites pour un délit mineur.
  • la suppression de l’usage massif des gaz et des nasses systématiques.
  • la mise en place de caméras dans les véhicules des forces de l’ordre et dans les cellules de garde à vue. 

 

CONTRE LE DÉNI DE JUSTICE,
nous exigeons : 

  • la création d’un organe indépendant pour enquêter sur les plaintes pour violences commises par personne dépositaire de l'autorité publique.
  • le dépaysement systématique des affaires judiciaires traitant ces mêmes plaintes, sur le modèle de la proposition de loi déposée par la députée Elsa Faucillon le 4 février 2020.
  • l’audition de tous les témoins par le juge d’instruction et non pas uniquement ceux autorisés par l’IGPN.
  • la mise à disposition des parties civiles de tous les enregistrements audio et vidéo disponibles.
  • l’encadrement et l'engagement de la responsabilité des médecins intervenant lors des procédures policières.

 

ENFIN, nous exigeons :

  • la radiation définitive des agents condamnés pour propos ou actes racistes.
  • la suspension immédiate des agents mis en cause pour homicide. Et leur radiation définitive s’ils sont condamnés.

 

Parce que sans justice il ne peut y avoir de paix durable,
nous vous prions, Madame la Défenseure des droits, d’écouter les voix des blessé.e.s et des familles de défunts.

 

Collectif Vies Volées, Comité Vérité et Justice pour Lamine Dieng, Comité Justice et Vérité pour Wissam, Association Paix et Justice pour Ibrahima Bah, Assemblée des Blessés, Collectif Vérité et Justice pour Hocine Bouras, Vérité pour Curtis, Collectif Justice et Vérité pour Nicolas, Aurélie Garand et le collectif Justice pour Angélo, Comité Vérité et Justice pour Gaye Camara, Yamina Djimli et le comité Vérité et Justice pour Mehdi, Salah Zaouiya et l’association Mémoire Jawad Zaouiya, Awa Guèye et le collectif Vérité et Justice pour Babacar Guèye, Geneviève Legay, Collectif Dar Harraga, Collectif Selom et Matisse, Justice pour Matisse, Boubacar Dramé, Makan Kébé, Vérité et Justice pour Morad, Les Mutilés pour l’exemple, famille de Mahamadou Marega, Comité Justice pour Cédric Chouviat.

#LaissezNousRespirer

(La liste des signatures est ouverte à toute victime de violences policières, individuelle ou collective.)

 

 

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 SOURCE : https://blogs.mediapart.fr/ramata-dieng/blog/050820/lettre-ouverte-la-defenseure-des-droits-15-propositions-pour-la-desescalade?utm_source=global&utm_medium=social&utm_campaign=SharingApp&xtor=CS3-5

 

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16 juin 2020

Samedi 20 juin 2020 #LaissezNousRespirer !#JusticePourLamine #JusticePourTous

 

Communiqué de la famille de Lamine Dieng

Il y a treize ans, le 17 juin 2007, notre fils, frère et oncle Lamine Dieng a été massacré par plusieurs policiers.

Plaqué au sol face contre terre, chevilles et poignets menottés ensemble dans le dos, traîné sur le bitume puis maintenu à plat ventre dans un fourgon de police, le poids de quatre agents sur lui. Lamine est mort asphyxié, le corps marqué de 30 hématomes. Son calvaire a duré une demi-heure.
Lamine avait 25 ans.

Depuis treize ans, notre famille se bat pour obtenir la vérité, la justice et la paix pour Lamine.

D’interminables années de procédures face à une machine judiciaire qui persistait à considérer ce crime comme un non-lieu. D’année en année, des magistrats nous ont dit que la mort d’un jeune homme noir sous les coups des policiers est un non-événement.
Depuis treize ans la justice française répète à notre famille que ces décès sont une chose ordinaire et normale pour les forces de l’ordre en France.
Nous avons vécu treize années de combat contre le déni de justice, face à une institution qui nous a systématiquement refusé un procès pour les responsables de la mort de notre fils, frère et oncle.

Mais le 4 juin dernier, l’arrêt rendu par la Cour européenne des Droits de l’Homme a entériné la culpabilité de l’Etat français, qui reconnaît sa responsabilité dans ce crime policier qui a tué Lamine. C’est une victoire !

Et pourtant, comme tout le monde l’a vu et entendu hier soir, alors qu’un mouvement international massif, historique, fait descendre les foules dans la rue contre le racisme policier et contre les violences impunies des forces de l’ordre, le président Macron n’a pas eu un seul mot pour les victimes insultées, humiliées, tabassées, blessées, mutilées ou tuées ces derniers mois.

Durant le seul mois d’avril dernier, dix hommes sont morts suite à une intervention policière. Dont quatre durant leur garde-à-vue au commissariat. Mais le président du comité de sauvegarde des statues d’esclavagistes n’a pas eu un mot ni une pensée pour ces victimes humaines.

Le chef de l’État a préféré insulter et dénigrer les dizaines de milliers de Français qui se rassemblent dans tout le pays pour manifester contre le racisme et réclamer la vérité et la justice, en les considérant ouvertement comme des ennemis intérieurs menaçant la République. Plutôt que de nous entendre, le « gardien de la constitution » a préféré reprendre le langage de l’extrême droite et nous coller une cible sur le dos pour nous désigner aux forces de l’ordre.

Comme chaque année depuis 2007 nous vous invitons donc à nous rejoindre pour célébrer la mémoire de Lamine.

Mais cette année est particulière !
En raison de notre victoire à la Cour européenne, en raison du confinement et de la multiplication des abus policiers et bien sûr en raison du mouvement international de solidarité contre le racisme policier et de la surdité du pouvoir, nous vous attendons massivement contre l’impunité des violences des forces de l’ordre et pour soutenir et faire entendre les voix des familles de victimes, des blessé.e.s et des mutilé.e.s

Ce samedi 20 juin, rejoignez partout en France les familles présentes dans les événements organisés. Chacun avec son masque et dans le respect des gestes de protection.

À Paris, rendez-vous place de la République, à 13h12, pour la marche #LaissezNousRespirer ! autour du quartier de Ménilmontant où habite notre famille.

Nous ne nous laisserons pas intimider par un président dont la seule réponse est de se cacher derrière ses policiers pour appliquer des politiques toujours plus brutales rejetées par la majorité de la population.

Pour garantir l’État de droit, nous exigeons :

• l’abrogation de l’article « permis de tuer » L435-1, de la loi de sécurité de 2017

• l’interdiction des techniques d’étouffement

• l’interdiction des armes de guerre (LBD, grenades) et des pistolets électriques sur la voie publique

• la suppression de l’IGPN et la création d’une institution indépendante pour enquêter sur les plaintes déposées contre les forces de l’ordre

• la radiation définitive de tout membre des forces de l’ordre ayant commis des actes ou tenu des propos racistes.

Comme on dit chez nous : #PasDeJusticePasDePaix

#JusticePourTous #LaissezNousRespirer #LaissezNousPasser

4 février 2020

Laissez-Nous Respirer !

Appel des familles contre l'impunité des violences policières,
pour l’interdiction des techniques d’immobilisation mortelles 
et des armes de guerre en maintien de l’ordre

Cédric Chouviat est le premier mort de l’année à cause de violences policières. Sera-t-il le dernier de la longue liste des personnes tuées par les forces de l’ordre ? Les statistiques des années précédentes nous font craindre que ce ne soit pas le cas. 26 décès en 2019, combien en 2020 ?

Nous apportons tout notre soutien et notre entière solidarité à la famille de Cédric pour qu’ils obtiennent la paix et la justice qu’ils demandent.

Car c’est aussi notre histoire. La vérité, la justice et la paix c’est aussi ce que nous demandons pour Lamine Dieng, 25 ans, décédé à la suite d’une clé d’étranglement et d’un plaquage ventral, tout comme Adama Traoré, 24 ans, Aboubacar Abdou, 31 ans, Abdelhakim Ajimi, 22 ans, Abou Bakari Tandia, 38 ans, Ricardo Barientos, 52 ans, Mohamed Boukrourou, 41 ans, Massar Diaw, 24 ans, Philippe Ferrières, 36 ans, Mariame Getu Hagos, 24 ans, Serge Partouche, 28 ans, Wissam El Yamni, 30 ans, Abdelilah El Jabri, 25 ans, Amadou Koumé, 33 ans, Mamadou Marega, 38 ans, Mohamed Saoud, 26 ans, Ali Ziri, 69 ans, mort après un pliage, Abdelhak Goradia, 51 ans, décédé par asphyxie dans un véhicule de police… et des dizaines d’autres « malaise cardiaque », « asphyxie », « mort naturelle » sans autre détail communiqués aux familles. Ce 3 janvier 2020, c’est Cédric Chouviat qui est décédé par asphyxie après une clé d’étranglement et un plaquage ventral.

Les témoins de cette interpellation ont confirmé ce que nous dénonçons depuis toujours : l’utilisation délibérée par les agents des forces de l’ordre de techniques extrêmement violentes et « potentiellement létales », selon la dénomination officielle. Clé d’étranglement, plaquage ventral et pliage, ces trois pratiques ont pour but d’immobiliser une personne en lui comprimant le thorax et le cou pour entraver la respiration. Mais plus la compression dure, plus l’interpellé manque d’oxygène et plus il se débat. Et plus les agents renforcent leur pression. Et plus cette violence tue.

Malgré les condamnations répétées de la France par la Cour européenne des Droits de l’Homme et par l’ONU, ces techniques continuent d’être pratiquées et de causer la mort. Malgré la condamnation de ces usages par la Ligue des Droits de l’Homme, Amnesty International et l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture, l’Etat se contente de justifier le « travail » de ses agents.

Comme la femme, les enfants et le père de Cédric, nous avons fait confiance à la justice de notre pays. Mais notre expérience pour que la vérité soit faite sur les violences qui ont tué nos proches nous a fait découvrir la réalité d’un déni de justice systématique pour les victimes. Un déni entretenu par une véritable culture du mensonge qui entraîne une culture du non-lieu.

La famille Chouviat a déjà subi le même traitement de la part des autorités que celui que nous avons connu : non-information des proches puis mensonges sur les causes de la mort, mépris de toute compassion élémentaire, tentative de criminaliser la victime pour la déshumaniser et maintien en activité des responsables de la mort d’un homme. Autant de souffrances, d’insultes, de calomnies qui s’ajoutent à la douleur des familles.

Ces contre-vérités des premières heures justifient des années de procédures interminables, d’enquêtes administratives et d’instructions bâclées, voire conduites à charge contre les victimes et leur entourage. Et bien sûr des frais de justice considérables. C’est tout un système auquel sont confrontées les victimes et leurs familles, qui révèle une impunité permanente aux membres de forces de l’ordre qui blessent, mutilent et tuent. C’est une violence judiciaire qui excuse, absout et prolonge les violences policières.

Ces brutalités permanentes étaient auparavant « réservées » aux habitants des quartiers populaires, comme le Mouvement de l’Immigration et des Banlieues le dénonçait il y a plus de vingt ans. Aujourd’hui, elles débordent dans les centres-villes. Et tous les témoins du déchaînement furieux de la force publique contre les mouvements sociaux peuvent désormais comprendre la violence d’Etat qui nous est imposée.

Cette violence assermentée à présent visible jusque dans les quartiers bourgeois est également celle des armes classées armes de guerre, là aussi d’abord utilisées dans nos quartiers. Le flash-ball est apparu en 1999. Et il a aussitôt éborgné Ali Alexis, à Villiers-sur-Marne. Cette arme a été remplacée par le LBD qui a été « inauguré » en 2007, à Villiers-le-Bel, pour mater la révolte des habitants après la mort de Moushin et Laramy percutés par un véhicule de police. Et les grenades comme celle qui a tué Rémi Fraisse en 2014 ou celle qui a tué Zineb Redouane en 2018 ; comme celles qui ont mutilé des dizaines de personnes et grièvement blessé des centaines lors des dernières manifestations, sont les mêmes qui explosent dans nos quartiers depuis presque dix ans.

Ce ne sont pas des « bavures » ni des « dérapages » mais des pratiques régulières autorisées par un État qui assume de pouvoir blesser grièvement, mutiler ou tuer un homme pour un contrôle d’identité.

C’EST POURQUOI NOUS EXIGEONS :

➡ L’interdiction totale de l’usage par les forces de l’ordre de toutes les techniques d’immobilisation susceptibles d’entraver les voies respiratoires.

➡ L’interdiction totale des armes de guerre en maintien de l’ordre (LBD, grenades GMD, GM2L et similaires).

➡ La création d’un organe public indépendant de la police et de la gendarmerie pour enquêter sur les plaintes déposées contre les agents des forces de l’ordre.

➡ La mise en place d’une réglementation qui associe la famille dès le constat de décès (autopsie autorisée seulement après un entretien de la famille avec les services de la médecine légale).

➡ La publication chaque année par le ministère de l’Intérieur :
• du nombre de personnes blessées ou tuées par l’action des forces de l’ordre,
• du nombre de plaintes déposées pour violence par les forces de l’ordre,
• du nombre de condamnations prononcées.

 

 LIEN PETITION: https://www.change.org/p/laisseznousrespirer-appel-des-familles-contre-l-impunit%C3%A9-des-violencespolici%C3%A8res
 

Et nous vous appelons toutes et tous à nous rejoindre
le 14 mars à Paris, pour la Marche de la Journée internationale
contre les violences policières

 

LAISSEZ-NOUS RESPIRER !
Vérité et justice – Pas de justice, pas de paix !

A l'appel du collectif Vies Volées et du comité Adama avec la famille Dieng et le comité Vérité et Justice pour Lamine Dieng (Paris, 20e), la famille d'Abou Bakari Tandia (Courbevoie, 92), la famille de Tina Sebaa (Saint-Fons, 69), la famille de Baba Traoré (Joinville-le-Pont, 94), la famille d'Abdelhakim Ajimi (Grasse, 06), la famille de Mahamadou Marega (Colombes, 92), la famille de Mahamadou Marega (Ivry, 94), la famille de Youcef Mahdi (Melun, 77), la famille d’Angelo Garand et le collectif Justice pour Angelo (Blois, 41), Awa Gueye et le collectif Justice et Vérité pour Babacar Gueye (Rennes, 35), le comité Justice et Vérité pour Wissam El Yamni (Clermont-Ferrand, 63), le comité Vérité et Justice pour Gaye Camara (Champs-sur-Marne, 77), le collectif Selom et Matisse (Lille, 59), le comité Justice pour Ibrahima Bah (Villiers-le-Bel, 95), le comité Vérité pour Curtis (Massy, 91), le comité Vérité et Justice pour Morad Touat (Marseille, 13), le comité Justice pour Liu Shaoyao (Paris, 19e), le comité Vérité et Justice pour Ali Ziri (Argenteuil, 95), Haby Koumé sœur d’Amadou Koumé (Saint-Quentin, 02), les parents et la sœur de Rémi Fraisse, le collectif Vérité et Justice pour Mehdi (Vaux-en-Velin, 69), Florica Floarea et le comité Vérité et Justice pour Dorel (Vigneux-sur-Seine, 91), Salah Zaouiya et l’association Mémoire Jawad Zaouiya (Mantes-la-Jolie, 78), Justice pour Mehdi Bouhouta (Vaux-en-Velin, 69), la famille Touré et le comité Vérité et Justice pour Zakaria (Troyes, 10), Syakha Traoré, frère de Bouna (Clichy-sous-Bois, 93), Geneviève Legay (Nice, 06), Franck Lambin, père d'Allan (Saint-Hilaire-des-Landes, 35), Vérité et Justice 31 (31), l'Assemblée des Blessés et les Mutilés pour l’exemple.

10 novembre 2019

POUR ERIC BLAISE ET SA FAMILLE.

Le 13 Novembre cela fera 14 ans que la famille Blaise a perdu un fils dans d'atroces conditions en prison sans jamais avoir obtenu ni vérité ni justice.
On oublie pas, on pardonne pas.


Des pensées pour la famille qui s'est battu pour faire entendre un peu de vérité, c'est son combat et la vérité que nous avons voulu  restituer ici  : https://player.vimeo.com/video/249945986

15 septembre 2019

SOIRÉE RAP CONTRE CHRISTOPHE COLOMB "DECOLONIZE AMERICA"

 Aucune description de photo disponible.
WAKE UP THE WORLD TOUR & TENIR LA LIGNE TOUR

SOIRÉE RAP CONTRE CHRISTOPHE COLOMB
"DECOLONIZE AMERICA"

1492 - Rien à célébrer !

Dimanche 13 octobre 2019 - à partir de 18h

au Centre international de culture populaire (CICP)
21TER Rue Voltaire, Paris 11e
(Métro : Rue des Boulets ou RER : Nation)

Avec

- Daiara Tukano
Artiviste autochtone Tukano du Brésil

Les Rappeurs autochtones de la Tournée "WAKE UP THE WORLD" :
- Will E. Skandalz
et son crew Beat Vandalz
(Rap Mohawk - Confederation Haudenosonee -Iroquoise- / Canada)
- Q-052
(Rappeur autochtone Mi'kmaq / Canada)

Le Rappeur SKALPEL en tournée avec "TENIR LA LIGNE TOUR" + GUESTS :

- Skalpel - Première Ligne
(Rap militant - Uruguay / Paris Banlieue)
- Kaiman Lanimal
- Sitou Koudadjé
- Titi Banlieusard

Organisé par PeopleKonsian - CSIA-Nitassinan - ART IS DEAD

PRIX LIBRE

#Decolonize
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11 septembre 2019

Non -lieu pour le policier qui a abattu Dorel Floarea en 2014 à Montgeron

Le 29 juillet 2014, à Montgeron, Dorel Floarea est abattu en plein jour par un agent de la BAC en présence de cinq autres policiers et de nombreux témoins. Atteint à l’abdomen, Dorel meurt quelques minutes plus tard, à l’âge de 42 ans.


Le 4 septembre 2019, sa famille et ses proches ont été informés qu’un non-lieu a été prononcé par le vice-président chargé de l’instruction au TGI d’Évry.
Après cinq années d’instruction, le juge a décidé de valider la version des policiers, c’est-à-dire l’état de légitime défense du brigadier mis en cause. Malgré un dossier contenant des éléments contredisant la version policière, notamment des témoignages de voisins et de passants contestant la dangerosité de la victime et la nécessité d’utiliser une arme à feu, et après avoir rejeté toutes les demandes d’actes des parties civiles, le juge innocente le policier.

La famille a appris la nouvelle par l’intermédiaire de son avocat et annoncé qu’elle fait appel de la décision du tribunal.


Dorel était un artisan du bâtiment domicilié à Vigneux-sur-Seine, une commune voisine où il était installé avec sa femme et ses deux enfants. Il était accompagné de son frère et d’un ami lorsqu’il a été atteint d’une balle en plein thorax ce jour d’été 2014. Malgré l’intervention des secours, il est décédé à 20h18 sur la voie publique.
L’auteur du coup de feu mortel est un brigadier de la BAC appelé en renfort par des policiers municipaux du commissariat de Montgeron. Il est immédiatement suspendu et placé en garde à vue pour « coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner », puis auditionné par les autorités administratives et judiciaires auxquelles il va livrer sa version des faits.
Puis le procureur de la République va annoncer l’ouverture d’une information judiciaire pour « violences avec usage ou menace d’une arme, ayant entraîné la mort sans intention de la donner par une personne dépositaire de la force publique ». Un juge d’instruction est alors nommé au TGI d’Évry et une enquête est ouverte par l’IGPN, « la police des polices ».
Le lendemain, un communiqué du parquet fait l’annonce suivante : « la mesure de garde à vue du policier mis en cause sera levée dans la soirée ». En effet, après avoir été entendu par les enquêteurs, le prévenu a été remis en liberté. Pour justifier cette libération en dépit du caractère criminel des faits, le procureur adjoint du TGI d’Évry, Rémi Crosson du Cormier, va invoquer « une vraisemblable situation de légitime défense ». Le jour même, les médias diffusaient cette version livrée aux magistrats, vite ficelée par les policiers et leurs syndicats (notamment Alliance) et immédiatement reprise par la municipalité et les institutions.

La famille n’a pas été contactée par les policiers et n’a appris la mort de Dorel que le lendemain, par la diffusion d’un reportage sur une chaîne de télévision roumaine relatant la mort d’un ressortissant roumain. Inquiète, elle s’est rendue de sa propre initiative au commissariat de Montgeron où les policiers lui ont confirmé l’identité du défunt.
Durant ces cinq années d’instruction, le fonctionnaire de police n’a pas été inquiété par la justice, il est resté sous le statut de témoin assisté et n’a plus été auditionné. En effet, après quelques heures de garde à vue dans son propre commissariat et auprès de ses collègues impliqués, il a pu rejoindre sa famille et ses proches.

 


Depuis plus d’un demi-siècle, les affaires d’homicides incriminant des fonctionnaires de police se succèdent et se soldent quasi systématiquement par des non-lieux. Une fois encore, un juge d’instruction a innocenté un policier tueur après des années de silence et d’immobilisme. On constate que dès l’ouverture de l’instruction, l’enquête a été orientée afin de satisfaire l’accord tacite qui prévaut dans le couple police-justice : la vie d’un homme et la douleur de ses proches valent moins que la liberté d’un agent de police et l’impunité de cette institution.

 


La famille et ses proches continuent la lutte afin de faire éclater la vérité sur la mort de Dorel.

 

 

 

justicepourdorel@gmail.com

https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=117638009616735&id=116530256394177

21 août 2019

A propos de la mort de Steve Maia Caniço

"Avaient-ils besoin de tels moyens ?" : les lacrymogènes au cœur de la polémique sur la mort de Steve Maia Caniço

Le soir de la Fête de la musique, trente-trois grenades lacrymogènes ont été tirées en vingt minutes. Une méthode justifiée selon l'IGPN, mais dont les témoins assurent qu'elle a contribué aux 14 chutes dans le fleuve recensées par les secours.

Une inscription \"Noyade interdite\" sur le quai Wilson, le 27 juin 2019, à l\'endroit où Steve Maia Caniço a disparu dans le anuit du 21 au 22 juin 2019Une inscription "Noyade interdite" sur le quai Wilson, le 27 juin 2019, à l'endroit où Steve Maia Caniço a disparu dans le anuit du 21 au 22 juin 2019 (J. LUSSEAU / HANS LUCAS)

"Je suis parti dans le mauvais sens, le sens du vent", confie Jérémy au micro de France 3 Pays de la Loire. "Les lacrymogènes m'ont suivi, c'était des fumées assez denses, je ne voyais plus rien. […] A un moment, j'ai mis les pieds dans le vide et je suis tombé à la renverse dans la Loire". Une chute de six mètres de haut, peu avant 5 heures du matin. Jérémy fait partie des 89 personnes présentes sur le quai Wilson, le soir de la Fête de la musique à Nantes, qui ont porté plainte contre les forces de l'ordre. Deux motifs : la "mise en danger de la vie d'autrui" et des "violences volontaires par personne dépositaire de l'autorité publique".

Sur le quai Wilson, dans la nuit du 21 au 22 juin, les organisateurs de la soirée ont reçu la consigne de couper le son à 4 heures du matin. Selon les témoins sur place, l'heure venue, neuf des dix sound systems se plient aux règles de tolérance mises en place par la mairie. Un seul, situé près du "bunker", refuse. Après le passage des policiers, le sound system récalcitrant décide de lancer La jeunesse emmerde le Front national de Bérurier noir. Il est 4 heures passées et la situation s'envenime. Selon Le Parisien, une douzaine de policiers sont présents sur les lieux et procèdent à des jets de grenades lacrymogènes avant que des CRS soient appelés en renfort. Les secours compteront 14 chutes dans la Loire ce soir-là. Parmi les personnes tombées à l'eau, un jeune homme d'une vingtaine d'années, Steve Maia Caniço, dont le corps sera retrouvé trente-huit jours plus tard.

"Le problème ? Les outils utilisés ce soir-là"

L'opération de police a-t-elle contribué à ces multiples chutes ? C'est ce que plusieurs enquêtes doivent notamment déterminer. La première, conduite par l'IGPN à titre administratif, a été rendue au Premier ministre le 30 juillet, suscitant une vive polémique. La synthèse du rapport, dont l'intégralité n'a pas été rendue publique, dédouane les forces de l'ordre en jugeant leur intervention légitime et le recours à la force, et donc aux grenades lacrymogènes, justifié. Les conclusions des auteurs du rapport semblent plutôt interroger la responsabilité des organisateurs et de la Ville, arguant du manque d'organisation, de sécurité et notamment de l'absence de barrières près du dixième sound system.

A la mairie de Nantes, ces conclusions ne passent pas. "Des barrières pour quoi faire ? Pour s'y faire écraser par la police ?", balaie Aymeric Seassau, adjoint PCF à la mairie de Nantes. "Il y a des installations de ce type-là depuis vingt ans à cet endroit à Nantes, on n'a jamais eu de problème. La responsabilité de ce qui s'est passé ce soir-là est entièrement celle de la police. Le seul problème, c'est l'intervention et les outils utilisés ce soir-là", accuse l'élu.

Pour l'avocate de Jérémy et des 88 autres plaignants, Marianne Rostan, le lien entre les grenades lacrymogènes et ces chutes est évident. "Des gens sont peut-être tombés plus tôt, de manière sporadique comme ça arrive régulièrement, commente-t-elle, mais le rapport de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) lui-même nous dit qu'entre 4 h 36 et 4 h 39 ce matin-là, plusieurs appels d'urgence sont passés pour signaler des personnes tombées dans la Loire. Or, l'intervention de la police s'étale de 4 h 31 à 4 h 52."

"Aucun mouvement de foule"

En effet, dans le document présenté par l'IGPN, on apprend que trente-trois grenades lacrymogènes MP7 ont été tirées ce soir-là à partir de 4 h 31, en riposte à des jets de projectile. Le rapport retient pourtant des différents témoignages cités, policiers et civils, qu'"aucun mouvement de foule [n'a] été constaté", que personne n'a observé "de personnes en panique ou en train de courir". A plusieurs reprises, le rapport mentionne les tirs de lacrymogènes mais les témoins cités insistent : il n'y a eu "aucun mouvement de foule".

L'objectif recherché par les tir de grenades : désorienter, disperser une foule et l'empêcher d'occuper une zone.Un expert en balistiqueà franceinfo

Classique dans l'arsenal de maintien de l'ordre, la grenade lacrymogène MP7 produit, une fois détonnée, une épaisse fumée irritante ; un mélange entre un gaz invisible, le gaz CS responsable des brûlures, et du fumigène. Non létale, elle ne présente qu'un risque minime pour la santé. Bien sûr, "lorsqu'on tire 5 ou 6 grenades d'un coup, il y a un effet fumigène instantané important, détaille un expert en balistique contacté par franceinfo. C'est notamment le cas lors de tirs en salve comme le veut l'usage dans la police. Car tirer une grenade à la fois n'aurait pas de sens. Ce sont cinq ou dix grenades qui vont être tirées en même temps."

Des gens "criaient et couraient, désorientés"

De quoi créer la panique ? C'est en tout cas ce que décrivent des agents de la Sécurité civile, interrogés par Presse Océan et Le Monde. "Je ne sais pas quelle est la définition du mouvement de foule de l'IGPN mais j'aimerais comprendre, fustige l'un des secouristes. Si c'est 'un grand nombre de personnes qui fuient rapidement un nuage de gaz lacrymogène', alors oui, il y en a eu un." Un autre décrit sans ambiguité "un mouvement de panique impressionnant" d'où provenaient "des explosions, des gens qui criaient et couraient, désorientés". "On a perdu en visibilité, comme sur les grosses manifs dans le centre-ville de Nantes", précise-t-on. 

Ces éléments, les agents de la Sécurité civile assurent les avoir transmis à l'IGPN dans leurs témoignages. Dans le rapport pourtant, il n'est pas question de "personnes qui fuient" ou de "panique". Un témoin cité relate simplement que "le déplacement de la foule s'était accentué" avant qu'il soit appelé "pour des personnes tombées à l'eau". Entre un "déplacement de foule" qui "s'accentue" et un mouvement de foule, quelle différence ? Le rapport ne le précise pas.

Confusion dans la chaîne de commandement

En revanche, ce que le rapport administratif révèle, sans toutefois s'y attarder, c'est un curieux flottement dans la chaîne de commandement. Dès 4 h 37 en effet, soit peu après les premiers tirs de lacrymogènes, les écrans du centre de supervision urbain d'où est suivie l'opération montrent "un épais nuage de fumée blanche qui empêchait toute visibilité sur la réaction des participants". Quasi immédiatement, l'ordre est donné deux fois de "cesser l'emploi des moyens lacrymogènes". Ces ordres ne sont pas suivis d'effets.

Jusqu'à 4 h 52, moment où le commissaire de la section de CRS envoyée en "renfort" sur le quai fait cesser les tirs, les détonations lacrymogènes se poursuivent. "A moins d'un péril imminent pour ses hommes, le commissaire sur le terrain était tenu d'obéir", nous confirme une source policière."On constate un ordre hiérarchique qui n'est pas respecté et pourtant, l'IGPN nous dit qu'il n'y a pas lieu de remettre en cause l'opération", s'interroge l'avocate des 89 plaignants.

Une situation d'autant plus surprenante que, très rapidement, les forces de l'ordre en intervention sont mises au courant de la présence dans la Loire de fêtards tombés à l'eau, comme l'attestent les vidéos amateurs réunies par Libération.

"Je ne conçois pas aujourd'hui que l'IGPN ne demande pas à ce commissaire pourquoi cet ordre n'a pas été respecté", proteste Marianne Rostan, qui invoque le manquement à l'"obligation d'obéissance" prévue par le code de la sécurité intérieure. Le commissaire a-t-il perdu le contrôle de ses hommes ? Dans ses conclusions, le rapport retient que "le commissaire divisionnaire ne se trouvait pas en capacité de diriger réellement ses effectifs" qui, pris à partie par des jets de projectiles, ont été contraints "de se défendre individuellement et d'initiative".

Dans un document qui n'a pas été rendu public mais dont des extraits ont été publiés par Mediapart (article réservé aux abonnés), le commandant de la section de CRS appelée à 4 h 50 en renfort explique avoir renoncé "à l'utilisation de tous moyens lacrymogènes pour éviter les mouvements de panique et les possibles chutes dans le fleuve voisin". Ce n'est qu'à ce moment-là, vers 4 h 52, que la situation revient au calme. Le rapport de l'IGPN le retient d'ailleurs, estimant que c'est grâce à "la combinaison de l'arrivée d'une compagnie complète de CRS [...] et la fin effective du recours aux moyens lacrymogènes" que la foule a fini par se disperser.

Ils n'étaient pas face à une situation insurrectionnelle. En face, c'était des gamins en short. A quel moment avaient-ils besoin d'utiliser de tels moyens ?Marianne Rostan, avocateà franceinfo

De quoi remettre en question la proportionnalité de ce recours aux grenades lacrymogènes, ainsi qu'aux dix grenades de désencerclement et douze balles de défenses utilisées dans la nuit du 21 au 22 juin. "Non seulement l'intervention de police doit être proportionnée mais la règle, c'est l'absolue nécessité, rappelle Marianne Rostan. Voilà sur quoi devait porter l'enquête de l'IGPN".

Pour éclairer les interrogations laissées par le rapport, il faut désormais attendre les conclusions de l'enquête judiciaire, au point mort depuis la demande de dessaisissement des deux juges nantais chargés de l'instruire. Une enquête administrative, menée par l'Inspection générale de l'administration à la demande du Premier ministre, devrait être rendue le 4 septembre.

Contactée par franceinfo, l'Inspection générale de la Police nationale indique que son rapport "est versé au dossier de l'enquête judiciaire" et que "le secret de l'instruction" l'empêche de faire un commentaire.

 

Source : https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/disparition-de-steve-a-nantes/

21 août 2019

Où en est "L’enquête" sur la mort de Zineb Redouane ?

La Cour de cassation a ordonné, mercredi 21 août, le dépaysement à Lyon de l’enquête sur la mort de Zineb Redouane, une octogénaire touchée par un tir de grenade lacrymogène en marge d’une manifestation de « gilets jaunes » à Marseille en décembre. La procédure, jusque-là instruite à Marseille, sera désormais entre les mains d’un juge lyonnais.

Le 1er décembre, de violents incidents avaient éclaté en marge de plusieurs manifestations à Marseille, notamment celle de « gilets jaunes ». Zineb Redouane, 80 ans, avait été touchée au visage par des morceaux de grenade lacrymogène alors qu’elle était en train de fermer les fenêtres de son appartement, situé au quatrième étage d’un immeuble rue des Feuillants (1er arrondissement). Elle est morte le lendemain à l’hôpital.

« Anticiper des polémiques inutiles »

Le parquet général d’Aix-en-Provence avait demandé ce dépaysement pour la « sérénité » de l’information judiciaire et « dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice ». Dans sa requête, le procureur général Robert Gelli relevait que, selon deux témoignages de CRS, un magistrat du parquet de Marseille était présent sur les lieux de la manifestation dans le cadre de ses fonctions. Ce magistrat avait été chargé ensuite du début de l’enquête, jusqu’à ce qu’elle soit confiée à un juge d’instruction marseillais, le 4 décembre.

« Ce magistrat pourrait être susceptible de fournir des éléments utiles » sur les faits et sera vraisemblablement entendu lors de l’instruction, « quand bien même sa responsabilité ne peut en aucun cas être recherchée », soulignait dans sa requête le procureur général Robert Gelli. Le drame ayant eu lieu lors d’une opération de maintien de l’ordre, la responsabilité « des autorités locales » pourrait être recherchée, ajoutait M. Gelli. Au Monde, il avait déjà expliqué en juin 

« Je considère que la sérénité de la poursuite de l’information à Marseille risque d’être perturbée. Autant anticiper des polémiques inutiles. »

Les avocats de la famille de Zineb Redouane avaient également appelé à dépayser au plus vite ce dossier, qu’ils estiment être une « affaire d’Etat ». Les proches ont déposé plusieurs plaintes, notamment pour « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner », et ont en outre saisi le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), estimant que le procureur de Marseille, Xavier Tarabeux, avait « manqué à ses obligations déontologiques ».

Aucun policier identifié

Au lendemain du décès de celle que ses proches surnommaient « Mama Zina », le procureur avait estimé que la mort de Mme Redouanerésultait « d’un choc opératoire et non d’un choc facial », ajoutant qu’« à ce stade, on ne [pouvait] pas établir de lien de cause à effet entre la blessure et le décès ». « C’est une honte qu’un procureur de la République divulgue des fausses informations à la presse en toute connaissance de cause ! », avait commenté l’avocat de la famille, Yassine Bouzrou.

Zineb Redouane est à ce jour la seule personne à avoir été tuée en marge du mouvement des « gilets jaunes », et pour laquelle la responsabilité de la police est mise en cause. A ce jour, le policier responsable du tir de grenade lacrymogène ayant atteint Zineb Redouane n’a toujours pas été identifié.
A la fin de janvier, les enquêteurs de l’inspection générale de la police nationale (IGPN), la « police des polices », ont entendu les cinq CRS dotés de lanceurs de grenade qui se trouvaient sur les lieux, ainsi que le capitaine qui les dirigeait. Après avoir regardé les images de vidéosurveillance, aucun n’a désigné le tireur ou n’a reconnu avoir tiré. Selon la fille de Zineb Redouane, rapportant des propos de sa mère au téléphone au moment de l’impact, un policier l’aurait, au contraire, regardée et visée. Deux cents grenades ont été tirées ce samedi 1er décembre.

Source : https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/08/21/l-enquete-sur-la-mort-de-zineb-redouane-pendant-une-manifestation-des-gilets-jaunes-depaysee-a-lyon_5501388_3224.html

21 août 2019

La terrifiante enquête photographique sur les "ravages" de Monsanto dans le monde

La terrifiante enquête photographique sur les "ravages" de Monsanto dans le monde Le livre, publié chez Actes Sud, retrace cinq ans d'enquête

© Mathieu Asselin - mathieuasselin.com

Pendant cinq ans, Mathieu Asselin a parcouru le monde avec son appareil photo sur les traces du géant agrochimique. Ses clichés sont édifiants

Des villes fantômes ravagées par la pollution, des générations d’enfants handicapés : une enquête photographique de longue haleine, présentée aux Rencontres d’Arles et publiée par Actes Sud, accuse le géant de l’agrochimie américain Monsanto.

L’enquête du photographe franco-vénézuélien Mathieu Asselin, qui a duré cinq ans, débute à Anniston, une petite commune de l’Alabama, haut lieu pendant des décennies de la production des PCB (polychlorobiphéniles), utilisés entre autres comme lubrifiants, revêtements imperméables et produits d’étanchéité. 

"Malgré un procès gagné en 2002 contre Monsanto, Anniston est contaminée, ravagée par la pollution, ses habitants sont malades, leur vie détruite. Monsanto connaissait pourtant la dangerosité des PCB depuis 1937", résume le photographe, devant des photos d’habitants dont les proches ont été fauchés par des cancers. 

La rédaction vous conseille

Mathieu Asselin a juxtaposé des publicités de la "Maison du futur" de Monsanto, présentée de 1957 à 1967 à Disneyland, en Californie, et qui draina 20 millions de visiteurs, et des clichés des maisons fantôme d’Anniston. "Aujourd’hui, c’est ça le futur selon Monsanto", affirme-t-il. 

Sud Ouest
Crédit photo : © Mathieu Asselin – mathieuasselin.com

"Plus de 500 00 bébés nés difformes"

Le travail du photographe se poursuit au Vietnam, sur les traces de l’agent orange, puissant défoliant fabriqué par Monsanto et déversé par l’armée américaine de 1959 à 1971 sur le sud du Vietnam. 

Depuis lors, "plus de 500 000 bébés sont nés difformes, le nombre de fausses couches et d’enfants mort-nés étant difficile à déterminer" et "plus de 2 millions de personnes dans le pays souffrent aujourd’hui de cancers ou de maladies liées à l’exposition chimique. 400 000 sont mortes ou handicapées", écrit Mathieu Asselin dans l’ouvrage, s’appuyant sur des recherches comme celles de la documentariste Marie-Monique Robin qui a travaillé sur Monsanto. 

"Ce sont des enfants de 2e ou 3e génération", souligne le photographe devant des clichés d’enfants de vétérans américains ou de jeunes Vietnamiens handicapés. "Certaines générations y échappent, ça voyage d’une génération à une autre et ça ressort d’un coup. C’est terrifiant."

> Le site de Mathieu Asselin

> Le site de l’exposition photo

 

Source : https://www.sudouest.fr/2017/07/15/la-terrifiante-enquete-photographique-sur-les-ravages-de-monsanto-dans-le-monde-3621103-706.php?fbclid=IwAR0HekBMQqPUmuB9e2tohJxZZ2mJKiNujoN23Asts1ltJ8inp8IQbYIZByo

21 août 2019

Stefan Zweig: «Avant 1914, la terre appartenait à tous ses habitants»


Voici ce qu'écrivait Stefan Zweig en 1942, à la fin de son livre "Le monde d'hier, souvenir d'un européen", texte testamentaire et autobiographique qu'il envoya à son éditeur la veille de son suicide au Brésil. En pleine crise internationale où se pose durement la question des frontières symboliques et concrètes de l'humanité, ce texte d'hier qui parle d'avant-hier décrit bien notre aujourd'hui...

 

 Stefan Zweig en 1900

« Et de fait, rien ne rend peut-être plus palpable l’énorme régression dans laquelle est entrée l’humanité depuis la première guerre mondiale que les restrictions apportées à la liberté de mouvement des hommes et à leurs libertés. Avant 1914, la terre appartenait à tous ses habitants. Chacun allait où il voulait et y restait aussi longtemps qu’il voulait. Il n’y avait pas de permissions, pas d’autorisations, et cela m’amuse toujours de voir l’étonnement des jeunes lorsque je leur raconte qu’avant 1914, je voyageais en Inde et en Amérique sans avoir de passeport et même n’en avais jamais vu aucun. On montait dans le train et on en descendait sans rien demander, sans qu’on vous demandât rien, on n’avait pas à remplir un seul de ces centaines de papiers qu’on réclame aujourd’hui. Il n’y avait ni permis, ni visas, ni tracasseries ; ces mêmes frontières qui, avec leurs douaniers, leur police, leurs postes de gendarmerie, sont aujourd’hui transformées en réseau de barbelés en raison de la méfiance pathologique de tous envers tous, n’étaient rien d’autre que des lignes symboliques qu’on traversait avec autant d’insouciance que le méridien de Greenwich. C’est seulement après la guerre que le monde se vit bouleversé par le national-socialisme, et le premier phénomène qu’engendra cette épidémie spirituelle de notre siècle fut la xénophobie : la haine ou du moins la peur de l’autre. On se défendait partout contre l’étranger, partout on l’excluait. Toutes les humiliations qu’autrefois on avait inventées exclusivement contre les criminels, on les infligeait maintenant à tous les voyageurs avant et pendant le voyage. Il fallait se faire photographier de droite et de gauche, de profil et de face, les cheveux coupés assez court pour que l’oreille fût visible, il fallait donner ses empreintes digitales, d’abord le pouce seul, puis les dix doigts, il fallait en plus présenter des certificats : de santé, de vaccination, de police, de bonne vie et mœurs, des recommandations, il fallait pouvoir présenter des invitations et des adresses de parents, il fallait fournir des garanties morales et financières, remplir des formulaires et les signer en trois, quatre exemplaires, et s’il manquait ne fût-ce qu’une feuille de ce tas de paperasses, on était perdu. »

Stefan Zweig, Le monde d'hier, souvenir d'un européen, Folio-Essais n° 616, p. 530-532.

 

Source : https://blogs.mediapart.fr/olivier-beuvelet/blog/181216/stefan-zweig-avant-1914-la-terre-appartenait-tous-ses-habitants?utm_source=facebook&utm_medium=social&utm_campaign=Sharing&xtor=CS3-66&fbclid=IwAR2fRJs1BwpJQYVb-0LoLAnaVLC1xTaYTf6ZI6ttqvAEMzwCK0pjUSgQSLMStefan Zweig: «Avant 1914, la terre appartenait à tous ses habitants»

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